jeudi 22 décembre 2011

COULISSES & CIES : épisode 2

Attention O.S.N.I. ! (Objet Scénique Non Identifié) 

Comment entrer de plain-pied à l’intérieur d’un tel projet ? Surtout quand celui-ci dure 5 h 30, que 3 des 4 pièces ont déjà été jouées et qu’il a démarré depuis 3 ans. Pour Christian Esnay et son équipe, fin janvier sera à Châtillon l’aboutissement de plusieurs années d'un travail titanesque sur Euripide. 

 

Bélaïd Boudellal © DR.

Vu de l’extérieur, je vous assure qu’il y aurait de quoi se faire quelques cheveux blancs. Non seulement le spectacle est ambitieux, mais Christian Esnay a la réputation de monter des projets complètement déjantés… Avec la Cie les Géotrupes, le mot d’ordre est simple : pas question de se reposer sur ses lauriers, ni de s’installer dans un train-train scénique parfaitement huilé.

De l’intérieur, l’équipe ne voit pas tout à fait le projet du même œil. Titanesque soit, mais pas si fou, comparé à ce qui a déjà été monté auparavant. Deux comédiens en témoignent…


Commençons par Bélaïd Boudellal (alias Bélo). Dans la troupe de Christian Esnay depuis 7 ans, il a participé à pas mal des "folies" du metteur en scène. En 2 minutes il nous raconte :






Rose-Mary d'Orros © DR.
Rose-Mary d'Orros © DR.
Rose-Mary d’Orros (appelée Rose par l’équipe), chanteuse, comédienne et costumière des Géotrupes depuis 11 ans. Alors forcément, Christian et ses idées hors du commun, elle les connaît bien.
Elle n'a pas l'air de s'ennuyer tellement le travail au sein de la Cie est dense. C'est un défi de chaque instant qu'elle aime relever, une sorte d'adrénaline qui l'envahit pour chacun de ses spectacles. Elle aussi nous dévoile un peu plus le travail de Christian Esnay... en quelques minutes : 


Christian Esnay © DR.
Christian Esnay © DR.
Enfin, nous avons fini par aller à la source :

- "Alors, Christian, titanesque ou pas titanesque ?"


La réponse est mesurée et franchement bien calme au vu du projet à venir…


Hummm, enfin, c’est ce qu’on dit… Parce qu’au fond ça doit bien bouillir un petit peu, non ?

Pour vous mettre en appétit, un petit goût de l'ambiance qui règne aux répétitions, mais aussi de ce qu'on pourra découvrir au Théâtre à Châtillon en janvier... entre rires et chansons, la bonne humeur est de mise et le spectacle prend vie… presque étonnamment !


entre_rires_et_chansons_!.mp3 Entre rires et chansons !.mp3  (646.5 Ko)

 

 

mardi 13 décembre 2011

COULISSES & CIES : épisode 1



Day first ou la découverte des "enfants terribles", alias les Géotrupes…


Les Géotrupes en répétition au Théâtre à Châtillon
Débarquement au milieu d’une troupe qu’on découvre tout juste, pour une pièce qu’on n’a jamais entendue, d’un auteur si peu joué et dont il ne nous reste en mémoire que les bribes d’un mythe. Pour Christian Esnay, ce sont les premiers jours de répétition d’un spectacle qui ne sera présenté que fin janvier. Pour la troupe (les Géotrupes), c’est plusieurs semaines d’échanges, de doutes, mais aussi de fous rires. Cinq mois, c’est long. Et c’est court, aussi. Surtout pour un tel projet.

Début septembre. C’est la rentrée. Ou presque. La scène châtillonnaise est encore silencieuse. Tout à coup, un rire éclate comme des bulles de cristal, c’est celui d’une certaine Pauline. La tonalité est puissante. Il détonne au milieu de ce plateau vide. Puis, c’est Bello qu’on appelle, on le cherche, il est l’éternel absent. Mais jamais très loin, il déboule en chantant, le sourire aux lèvres, l’œil brillant et le bonjour généreux. Côté jardin, Sylvie pianote sur un accordéon, elle écrit, chantonne, gomme quelques notes puis recommence. Rose, assise au milieu du plateau, relit son texte et jette au hasard quelques mots qui parviennent jusqu’à nous. Christian, antithèse du metteur en scène tout-puissant et perché dans toute sa hauteur, est assis dans la salle. Il lève à peine la tête, car il tente désespérément de comprendre le fonctionnement de son téléphone portable...

Règne un léger vent de mauvais élèves et d’école buissonnière. Ah ! Qu’on s’y sent bien. Le théâtre s’éveille à peine que déjà on aime ces voix colorées et ces billes de clown.

Mais les présentations, on s’les fera plus tard…On aura tout le temps de faire connaissance.
Et puis, les enfants terribles, ça ne se découvre pas comme ça. 

En attendant, essayons de garder notre sérieux puisqu’il s’agit tout de même de :
-  tragédie,
-  de meurtres d’enfants,
-  de mère désœuvrée
-  et de règne déchu.

Chez Euripide, le sang coule à flots et les Grecs demeurent intraitables face au désespoir d’Hécube, cette fameuse reine qui a perdu ses 50 enfants lors de la guerre de Troie.

C’est vraiment pas gai tout ça. On retient donc son sourire et on tente de rester sérieux. Pourtant, pas facile avec les Géotrupes, le rire n’est jamais loin. Il effleure les babines, et titille la jolie frimousse des comédiens.

-Ah, mais Christian, c’est parce que c’est le premier jour que c’est comme ça ?
-Mais non, pas du tout. Je suis surtout convaincu que c’est comme ça qu’Euripide voyait la tragédie…

Je relis donc Hécube dans la traduction de Jean Delabroy. Après celle des éditions Gallimard, les différences sont notables dans la variation, le rythme et la modernité du vocabulaire choisi. Euripide en devient presque un jeu... d'enfants terribles (!), drôle, sinon coloré. Ici on "perfuse" le malheur à coups de chansons.

Christian Esnay nous explique alors qu’Euripide est tout sauf morose. Il serait la version anglo-saxonne du théâtre, le Shakespeare des temps antiques qu’on doit absolument réhabiliter. En bref, la monstruosité à l’état pur, une forme de grotesque (comme dirait Hugo), un théâtre à la fois varié et béant.

Là on parle d'Hécube, mais qu’en est-il des trois autres pièces (Hélène, Oreste et le Cyclope), constitutives de la tétralogie et de ces 5h30 de spectacles attendus ?

Le premier jour se termine. On a réussi à entrouvrir la porte des Géotrupes. L’entrebâillement est encore modeste, mais on a au moins compris qu’on n’allait pas s’ennuyer…

A VENIR, EPISODE 2 : Du projet aux répétitions, entre rires et chansons



Pauline, comédienne

INFORMATIONS PRATIQUES :

Textes : Euripide.
Traduction : Jean Delabroy.

Mise en scène : Christian Esnay.
Avec : Belaïd Boudellal, Rose Mary D’Orros, Pauline Dubreuil, Christian Esnay, Sylvie Magand.
Musiques : Martine-Joséphine Thomas, Isabelle Van Brabant, Rose Mary D’orros.
Arrangements musicaux : Sylvie Magand.
Scénographie : François Mercier.
Lumière : Bruno Goubert.
Costumes : Rose Mary D’orros.
Son : Jean-Baptiste Lecomte, Régis Sagot.

Du 21 janvier au 5 février
Jeudi 26 et vendredi 27 janvier à 20h30 : "Hélène" et "Hécube".
Jeudi 2 et vendredi 3 février à 20h30 : "Oreste" et "Le Cyclope".
Les samedis à 15h30 : intégrale.
Les dimanches à 13h : intégrale.
Relâche les lundi, mardi et mercredi.

Renseignements : 01 55 48 06 90


Christian Esnay, metteur en scène


vendredi 9 décembre 2011

COULISSES & CIES : préambule...


Avant-billet pour une avant avant-première : allons, en coulisses !
Et que les souris dansent !

Si vous étiez un badaud tout droit sorti de l’imagination d’un Beckett, vous diriez certainement « mais qu’est-ce qu’elle fait là penchée sur son mamelon à rapporter tout ce qui s’y passe» ? Et à quoique bon que celle-là elle m’parle de ce qu’elle a vu ? »

Sans me prendre pour la Winnie de « Oh les beaux jours » et encore moins pour une héroïne dramatique, je dirais que pénétrer l’âme d’un théâtre et entrer dans la danse de ses acteurs bien avant une avant-première est pour moi une expérience et une émotion que j’ai toujours eu envie de faire partager.

Après tout, quand vous visualisez un DVD, bien souvent réalisateurs et acteurs se livrent en images à l’explication technique du film depuis sa conception jusqu’à sa réalisation. Et même, quand son « making off » est un peu court ou qu’il a été sucré par la production, alors que le film vous a plu, peut-être vous dites-vous qu’on s’est un peu fichu de votre tête en vous vendant le film stricto sensu.

Alors, pourquoi pas au théâtre ? Si l’idée était aussi de vous montrer en sons, en images et en témoignages toute la préparation d’un spectacle ?

L’envie de se faire plaisir, bien entendu. Mais n’y a-t-il pas aussi dans tout cela un devoir de mémoire, surtout à notre époque ? On prend, on jette, on consomme et dans le meilleur des cas on s’écrie avec des « Oh ! » et des « Ah ! ».
Et puis ? Que reste-t-il ?

Mais il y a aussi des rencontres. Et Christian Lalos et son équipe en font partie. Grâce à eux, j’ai pu me faufiler dans les coulisses du Théâtre à Châtillon et telle une petite souris,  prendre part – du moins observer – un spectacle en création. L’événement est en effet de taille. Il est programmé pour fin janvier.

Aux commandes ? Christian Esnay. Il met en scène quatre pièces d’un dramaturge qu’on ne voit jamais au théâtre : ce sera Euripide dans une tétralogie, pour plus de huit heures de spectacle.

- Rien que ça !

- Oui, Il fallait oser, c’est sûr ! Surtout dans un théâtre municipal.

Mais après tout, n’est-ce pas aussi un peu ça le théâtre ? Regarder avec le plus de hauteur possible et observer ce qu’il s’y passe en bas. Parfois, il ne se passe rien, parfois aussi il faut attendre des heures avant qu’un petit miracle ne se produise. Mais dans ce cas… quel miracle !
Beckett avait tellement raison, non ? 


....

Et d'autres billets suivront la semaine prochaine...


 http://www.larevueduspectacle.fr
http://www.theatreachatillon.com